Demain, cela fera une semaine que ma colloc suédoise s'est installée et je ne vous ai même pas encore parlé d'elle. La journée d'aujourd'hui me donne une occasion en or de vous la présenter.

Tout a commencé dimanche soir. J'étais tranquillement devant mon pc quand j'entendis Emily (c'est son petit nom) pleurer à chaudes larmes. Je m'en vais donc voir de son côté et lui demande ce qui se passe.

Là, je dois digresser pour que vous compreniez. En fait, Emily a quitté son précédent appart parce qu'il était envahi d'insectes, semblerait-il. Mon vocabulaire anglais étant assez pauvre concernant les sortes d'insectes, je n'ai pas demandé plus de precisions. Toujours est-il, que ce dimanche soir, dans notre salle de bain, deux de ces fameux insectes étaient présents. Un peu étonnée parce que je n'ai pas vu un insecte en trois mois dans cet appart, j'ai tenté de la rassurer en lui disant que c'était peut-être des individus qu'elle avait emmené dans le déménagement et qu'il n'y avait pas de quoi s'enerver.

Je sais, je fais ma grande gueule là parce que dans la vie j'ai très peur des insectes. Mais pour avoir peur, moi j'ai besoin de les voir, les insectes, ce qui n'était pas le cas ici. Donc je pensais que c'était fini, mais non. Lundi soir, je suis rentrée de cours et, complètement stressée, Emily m'explique qu'elle a passé un papier entre le mur et les plinthes de toutes les pièces et que partout, il y avait des insectes. Là, l'inquiétude montant, je lui ai quand même posé la question sur quel type d'insecte c'était.

Il s'agit en fait de l'anthrène du bouillon blanc (pälsängrar en suédois). Un nom bien pompeux pour une sorte de mini coccinelle à carapace brune. J'étais rassurée en sachant ça, car durant mes deux années à Haguenau j'ai cohabité paisiblement avec cette espèce qui avait trouvé refuge dans ma moquette. Toujours est-il, qu'Emily ne cohabite pas. Nous avons alors décidé d'appeler une société spécialisé pour nous débarasser des envahisseurs. Le rendez-vous fut pris pour vendredi, ce matin donc, à 8h. Quelques instructions nous ont été donnés : décoller les meubles de quinze centimètres du mur, vider les armoirs, et mettre les vêtements dans des sacs.

Ca tombait bien, je n'avais que ça à faire ces derniers jours. Je vous raconte pas mon enthousiasme, ce matin à 7h.

A 9h30, un technicien assez jovial est arrivé. Emily lui a raconté sa version des faits en suédois. Je me suis permis de rajouter que, personnellement, je n'en avais pas vu un seul en trois mois. J'aurais volontiers rajouté que quand on fait lever les gens pour 8h on n'arrive pas à 9h30, mais étant donné mon rapport à la ponctualité, je me suis abstenue, attendu que sur ce point là, je n'ai de leçons à donner à personne. De toutes façons, en regardant par lui-même, il a bien vu qu'il n'y avait rien.

Toujours est-il que notre boby nous a expliqué qu'il nous mettait dehors pour deux heures et qu'en rentrant on allait trouver tous les insectes qui sont, soi-disant, à l'interieur des murs, agonisant sur notre plancher. Et qu'il faudrait attendre 8h de plus pour aspirer. Ayant parfaitement cerné le côté anxieux de ma colloc, il a cru bon de rajouter que nous pouvions nous attendre à entre 300 et 400 individus, le sourire aux lèvres.

Nous sommes donc parties. Pour ma part, je suis allée nager puis travailler à la bibliothèque. Sur le chemin du retour, je me préparais à trouver la maison envahie de cadavres d'insectes. Finalement, rien. Même pas un. J'étais en train de me dire mentalement que, ouf, une bonne chose de faite quand arriva Emily dans ma chambre. En passant un papier entre la plinthe et le mur de sa chambre (mais pourquoi?), elle avait trouvé deux insectes. Vivant de surcroît. Elle me dit alors qu'il fallait rappeler le gars, que ça n'avait pas marché, que dans deux jours ils allaient être 3000.

Comme je commençais à trouver l'histoire de moins en moins drôle, je lui ai dis que de toutes façons il fallait attendre cinq semaines, que c'était surement les deux seuls survivants, et qu'il fallait qu'elle arrête d'être aussi stressée. Elle a acquiescé mais m'a tout de même informé que nous allions devoir passer l'appartement à l'eau de Javel, pour être bien sures.

Le pire de toute cette étrange histoire, c'est que je n'ai vraiment pas vu une seule bestiole ici en trois mois et je finis par me demander si cette gentille jeune fille n'a pas des hallucinations dues à sa récente invasion, dans son ancienne maison. Ou tout simplement dues à un manque de proteines de son organisme. Figurez-vous que la demoiselle est végétarienne et après avoir gouté à son tofu frit la semaine dernière, je peux comprendre que son corps fasse n'importe quoi.

Tout ça pour dire, Caro, si tu me lis, même si tu ronfles, même si tu retournes tes cartes au UNO, même si tu te moques de mes cheveux, t'étais une colloc carrément mieux ! Et même que tu me manques.